Lorsque nous entendons parler de la crucifixion de Jésus-Christ, nous pourrions supposer qu’après tout, il a bien mérité de mourir. S’il n’était même pas capable d’éviter la croix, pouvons-nous croire qu’il est bien le Dieu tout-puissant qu’il prétendait être ? Mais le récit des derniers jours de son ministère à Jérusalem nous apprend que sa mort n’était pas un accident ou même un concours de circonstances. Jésus devait mourir. Lui et les chefs religieux le savaient.
Série Le coût de sa gloire – lire Jean 11.45-57 (partie 3)
Une décision motivée par la peur
Alors, les chefs des *prêtres et les pharisiens convoquèrent le *Grand-Conseil. — Qu’allons-nous faire ? disaient-ils. Cet homme accomplit trop de signes miraculeux ; si nous le laissons faire de la sorte, tout le monde va croire en lui. Alors les Romains viendront et détruiront notre Temple et notre nation.
(Jean 11.47-48)
C’est un peu surprenant d’entendre des gens qui en veulent à Jésus. Si nous nous fions au récit des évangiles, nous ne pouvons pas concevoir que des gens se sentiraient menacés par un personnage plutôt bonasse comme Jésus. Comparé aux tyrans et hommes de guerre, Jésus n’est pas le genre de personnage qui inspire la peur. Mais pour les chefs religieux du temps de Jésus, c’est exactement le sentiment qu’il inspirait.
Dans un certain sens, la nation d’Israël était depuis plusieurs décennies fascinées par une remontée de ferveur religieuse intimement liée à son désir de retrouver un certain contrôle et une autonomie dans la région. Son histoire était intimement liée à l’alliance de Dieu avec son peuple. Nous ne pouvons donc pas présumer comprendre l’histoire de ce peuple sans aussi comprendre le lien étroit qui existe entre son attachement à la Torah (loi de l’Eternel) et la bénédiction de Dieu sur son pays.
Les juifs considéraient aussi l’invasion romaine comme la conséquence inévitable d’avoir manqué à sa tâche devant l’Éternel. Son joug politique était synonyme d’infidélité spirituelle. Et pour cela, ils étaient en train de payer le prix. Certains membres de la classe politique comme les sadducéens privilégiaient une approche plutôt diplomatique qui misait sur leur habileté d’influencer leurs relations politiques avec les représentants de Rome. D’autres membres de cette classe à part comme les pharisiens privilégiaient une approche spirituelle qui misait sur la ferveur religieuse du peuple autant pour assurer le bon ordre de la société que pour attirer la faveur et la bénédiction de Dieu.
Pour tous ceux qui avaient un rôle à jouer dans la direction de la nation d’Israël, la montée en popularité de Jésus présentait un risque considérable. Jésus venait déstabiliser non seulement l’ordre religieux maintenu en place par ces chefs, mais aussi l’ordre politique qui dépendait en grande partie à la bonne volonté de Rome.
Il n’est donc pas surprenant de voir l’intensité grandissante du mépris contre Jésus chez les pharisiens. Ses enseignements étaient évalués en fonction du zèle révolutionnaire qui se faisait sentir chez le peuple, un zèle spirituel mêlé à un vent de changement politique. Rome, César, Hérode, les pharisiens, les Sadducéens… tout le monde allait y passer.
Le comble est que Jésus ne parlait pas d’établir un Royaume terrestre. Ses enseignements et sa spiritualité étaient dirigés vers le Dieu de l’univers et lui, comme l’image fidèle de Dieu, le Fils de Dieu. Ceux qui le suivaient étaient motivés et encouragés à ne pas rechercher leur valorisation dans les choses terrestres, mais à trouver leur identité dans une relation renouvelée avec leur Créateur.
Mais malgré l’emphase non politique et non terrestre du message de Jésus, beaucoup voyaient en lui un libérateur politique, un révolutionnaire et un dirigeant capable de changer le cours de la nation juive.
Comme la fête de la Pâque approchait, beaucoup de gens de tout le pays montaient à Jérusalem avant la fête pour se soumettre aux cérémonies rituelles de purification. Ils cherchaient donc Jésus et se demandaient entre eux, dans la cour du Temple —Qu’en pensez-vous ? Croyez-vous qu’il viendra à la fête ? (Jean 11.55-56)
Une solution divinement inspirée
50 Vous ne voyez pas qu’il est de notre intérêt qu’un seul homme meure pour le peuple, pour que la nation ne disparaisse pas tout entière ? 51 Or ce qu’il disait là ne venait pas de lui ; mais il était grand-prêtre cette année-là, et c’est en cette qualité qu’il déclara, sous l’inspiration de Dieu, qu’il fallait que Jésus meure pour son peuple. (Jean 11.50-51)
C’est le grand-prêtre, Caïphe qui prend la parole. Il est celui qui est chargé d’entrer dans le temple pour accomplir le rituel de la purification pour le peuple. Il est prêtre dans la lignée d’Aaron, le compagnon de Moïse. Il est un homme respecté et au travers duquel Dieu révèle son alliance pour Israël. Nous pourrions même aller jusqu’à affirmer que Caïphe représente la loi, l’Ancienne Alliance de Dieu avec son peuple Israël.
Nous ne devrions donc pas être surpris que cet homme possède un raisonnement spirituellement plus aigu que son entourage. Le rôle de grand-prêtre n’était pas confié à n’importe qui et n’importe comment. Dieu parle au travers de lui et Jean l’évangéliste y voit la main de Dieu même si Caïphe possède une motivation tout autre en ce qui concerne Jésus.
Caïphe affirme prophétiquement qu’il est préférable qu’un seul homme meurt pour le peuple. Ainsi, la vie du peuple sera épargnée. Caïphe ne pouvait pas saisir la signification évangélique de ce qu’il affirmait. Car Jésus devait en effet mourir pour le peuple afin que le peuple de Dieu puisse avoir la vie en lui et être restauré à Dieu par le pardon gracieux de leurs péchés. C’était une bonne nouvelle qui était voilée.
Ce thème de l’action divine et gracieuse se manifestant par la bouche d’un homme ou d’une femme qui est en fait rebelle à la direction de l’Éternel n’est pas un phénomène nouveau ou même isolé. Nous pouvons considérer les passages suivants :
L’Eternel a tout fait pour un but, même le méchant pour le jour du malheur. (Prov 16.4)
32 Car Dieu a emprisonné tous les hommes dans la désobéissance afin de faire grâce à tous. […] 36 En effet, tout vient de lui, tout subsiste par lui et pour lui. À lui soit la gloire à jamais ! Amen. (lire Rom 11.28-36)
Nous pouvons donc affirmer avec une certaine confiance que Dieu agit souverainement pour sa gloire au travers de gens qui ont une volonté contraire à la sienne. Ce n’est pas pour ainsi dire qu’ils sont sous le contrôle de Dieu. Mais Dieu, d’une façon que nous ne pouvons pas expliquer avec précision, faufile sa volonté et ses desseins au travers des paroles et des actions des hommes, même au travers de ceux qui sont opposés à sa direction. Jésus devait donc mourrir. Sa mort n’était pas un accident. Ce n’était pas un manquement ou un plan B. Jésus savait qu’il devait mourrir. Mais Jean veut nous faire comprendre que la mort de Jésus était foncièrement injuste, le produit d’un complot. Le Fils de Dieu subira une mort complètement injuste et motivée par l’orgueil d’hommes assoiffés de pouvoir.
Application
De quoi aurais-je peur si Dieu accomplit ses desseins même au travers des mauvaises intentions de ceux qui veulent faire le mal ?